Troublantes similitudes
2 juin 2014 par Guillaume Prieur - Vue(s) d'Europe
Le Front national, en remportant ces élections européennes, enverra 24 députés à Bruxelles et à Strasbourg. Le Parti Pirate sort, lui, laminé de ces élections. En France, il aura réussi l’exploit de réunir 0,32% des voix dans les circonscriptions dans lesquelles il avait des candidats, montrant par la même occasion qu’il était mieux outillé pour fabriquer des réponses toutes faites aux consultations de la Commission européenne sur le droit d’auteur que pour recueillir les voix de ses concitoyens. En Europe, une seule députée, allemande, défendra les couleurs du Parti Pirate. Exit les 2 députés européens suédois qui siégeaient au nom du Parti Pirate, et en particulier, Christian Engström dont l’acharnement contre la rémunération contre la copie privée remplissait d’aise les Apple et autres constructeurs de matériels de copie.
Au-delà de la différence de situations entre un parti Pirate mis en échec dans les urnes et un Front national, grand victorieux de la soirée électorale, apparaît entre les deux partis, un lien étrange et une continuité étonnante : les défenseurs acharnés de la liberté sur le Net rejoignent l’extrême-droite europhobe dans leurs propositions sur la politique numérique et le droit d’auteur.
Les déclarations de Marine Le Pen et de ces conseillers ces dernières années ne laissent place à aucun doute sur cette convergence :
• L’extension de la redevance audiovisuelle aux ordinateurs et tablettes ? Ce serait « une nouvelle intrusion de l’Etat qui entrave gravement nos libertés individuelles et numériques ».
• ACTA ? Les accords ACTA n’ont pour objectif que « de museler la Toile ».
• La neutralité du Net ? il faut contrer « les exigences, pour le moins suspectes, de certains lobbies des opérateurs télécoms ».
• Hadopi ? « Le maintien d’Hadopi et de sa philosophie démontre que le gouvernement méprise la liberté sur internet. Le Front National demande l’abrogation immédiate de la loi HADOPI et son remplacement par une licence globale. »
Plus qu’une convergence accidentelle, ces déclarations frontistes montrent une porosité idéologique avec les croisés du Net. Cette configuration, pour le moins surprenante, pousse à se demander si leur attachement aux grands principes les encouragera à rester éloignés d’un groupe extrême-droite.
On peut en douter de la part de personnes qui, pas toutes mais certaines, n’ont jamais éprouvé de gêne à être soutenus financièrement par un Georges Soros, grand spéculateur mondial, qui a mis à genoux des pays entiers. Alors, être soutenus par les amis de Vladimir Poutine, ce n’est certainement pas plus grave, non ?
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Commentaires (6)
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Quid des liens troublants avec EELV ? Ne votent-ils pas comme les députés d’extrême droite sur ces dossiers ?
Très juste !
Pour ajouter de l’eau à votre moulin
voir discussion sur:
http://videoludroit.com/2014/03/25/539/
Le PP se dit compétent sur le Net alors qu’il ne sait pas se positionner sur le PartageMarchand, ne défend plus la contribution créative en détail, et voudrait que les artistes ne vivent seulement d’un RdB. C’est aussi insultant pour la création numérique que certaines théories du FN. La différence est peut être que le populisme du PP est involontaire, par incompétence et par irresponsabilité, tandis que celui du FN est volontaire et parfaitement maitrisé par les meneurs.
Vous voulez dire que le PP a copié son programme sur le FN ? Que ce sont des fascistes ? Un peu de courage non ? Ou alors etes vous stupide ? Si le FN est pour les antibiotiques, vous êtes contre par opposition ?
Ah si le PP avait votre budget de fonctionnement, cela fait longtemps qu’il aurait des élus et vous aurait mis au chômage.
Bonjour,
Donc si un jour le FN se déclare « contre le viol », « contre la pédophilie » et « pour la paix » alors je pourrais être assimilé au FN?
Zut alors!
Petite réponse pour les amateurs de raccourcis : si un électeur du Parti pirate ne sera pas nécessairement un futur électeur du Front national (et il est vrai qu’on aurait plutôt tendance à les situer à des bords extrêmes sur l’échiquier politique), il n’en reste pas moins que les positions adoptées sur le numérique et le droit d’auteur relèvent toutes deux d’une forme de populisme.
D’un côté, les défenseurs du Net veulent dessiner un monde où on se partage librement les biens culturels sans tenir compte des nécessités de financement de la création, où certains pourraient toutefois bénéficier d’une sorte d’aumône publique (merci !), où la régulation est forcément suspecte des pires travers, où la création des auteurs serait forcément un bien public. A ce propos, je vous conseille cette lecture très instructive du blog de l’auteur de BD Manu Larcenet : http://www.manularcenet.com/blog/articles/10876/closing-time?utm_content=buffer55b92&utm_medium=social&utm_source=twitter.com&utm_campaign=buffer
D’un autre côté, des gens classés à l’extrême droite du paysage politique et qui depuis des années ont enfourché comme cheval de bataille la défense de la liberté d’expression sur Internet. Pour des raisons ou des motivations sans doute différentes de celles des pirates, mais, en politique, le résultat importe plus que la motivation !
Au final, un même combat : faire d’Internet une zone où tout est permis (ou presque) parce que tout est possible !
Et dès le dimanche soir des élections, les premières réactions de quelques geeks ne disaient pas autre chose : finalement, avec 24 députés, le FN pourra défendre de bonnes positions sur le numérique et le droit d’auteur.
J’ai 23 ans, et j’avoue que je fais parti de ceux que « dénonce » ce lobbyiste patenté. Je me suis éveillé à la politique avec Hadopi, j’ai vu comme un nez au milieu de la figure la corruption et le mensonge regner dans les rangs de l’UMP, la surveillance généralisée des population mise en place par Sarkozy, puis poursuivie par Hollande, et les intérêts particuliers primer de façon systématique sur le collectif.
Si je vote aujourd’hui FN, c’est moins par approbation de leur idées que pour mettre fin à ce système – que la SACD comme la SACEM représente à merveille. Un système où le politique s’achète, où les populations sont traitées comme des ennemis, où on demande aux jeunes de la fermer et d’accepter sans rechigner la dette laissée par leurs ainés, la ruine écologique, avec, qui plus est, l’obligation de leur payer leur retraite.
Après moi le déluge semble être devenu le moto de la génération qui nous gouverne. Les jeunes disent désormais non. Il faut faire dérailler ce système à tout prix, fusse-ce au prix du FN.
J’ai voté Hollande en croyant sincèrement à sa volonté de mettre fin à Hadopi, je voterai désormais FN jusqu’a ce qu’ils comprennent.