Auditions au Parlement européen : le grand oral des Commissaires

5 novembre 2024 par - Vue(s) d'Europe

Top départ pour les auditions des candidats commissaires devant le Parlement européen ! Pour le secteur culturel, deux de ces grands oraux sont particulièrement à suivre : d’une part, la Vice-Présidente exécutive Henna Virkkunen, responsable de la Souveraineté Technologique, la Sécurité et la Démocratie, qui a obtenu un très large portefeuille englobant la Direction Générale Connect et lui assurant une responsabilité particulière pour conduire l’ensemble de la politique audiovisuelle pour les cinq prochaines années. D’autre part, le Maltais Glenn Micallef qui sera responsable de l’Équité Intergénérationnelle, la Jeunesse, la Culture et le Sport, une nomination qui suscite son lot de questions, car ses attributions sont surtout transversales et menées de cœur avec les autres Commissaires.

 

Pour l’audiovisuel : questions incontournables sur l’IA et le numérique

Répondant aux premières questions posées à l’écrit par les députés, Henna Virkkunen a d’ores et déjà annoncé des mesures en faveur de la diversité culturelle dans le secteur audiovisuel. Consciente de l’impact croissant de l’intelligence artificielle (IA) sur les œuvres protégées par le droit d’auteur, elle a expliqué vouloir soutenir le développement d’un marché de licences, ayant l’objectif de garantir une rémunération adéquate aux créateurs et d’assurer la disponibilité de données de haute qualité pour les fournisseurs d’IA, notamment les PME européennes. Les promesses n’engageant souvent que ceux qui les écoutent, il appartiendra à la Commissaire de donner des traductions concrètes à ces annonces pour que le secteur audiovisuel bénéficie d’un cadre effectivement protecteur pour les droits des auteurs et pour mettre fin à ce qui peut ressembler à un pillage des œuvres.

En ce qui concerne la directive Services de Médias Audiovisuels (SMA), qui impose des obligations de soutien à la création aux plateformes de streaming et aux chaînes de télévision, la Vice-présidente reconnaît que ce texte reste un pilier essentiel de la politique des médias de l’Union. Elle identifie à juste titre quelques défis importants à relever : la visibilité des œuvres européennes en ligne, le cadre autour de l’obligation d’investissement, l’évolution du marché, et la protection des droits de propriété intellectuelle. De toute évidence, ce seront des sujets cruciaux pour l’avenir du soutien à la création audiovisuelle en Europe. Après le renforcement utile de la régulation intervenue ces 10 dernières années, il faudrait veiller à éviter une vague qui viendrait fragiliser des dispositifs, que ce soit les obligations d’investissement ou d’exposition des œuvres européennes, qui ont fait leurs preuves.

 

Pour la Culture : remettre au centre des enjeux cruciaux

Le commissaire Glenn Micallef a également communiqué ses premières réponses aux interrogations des parlementaires. Il n’en reste pas moins une question ouverte : quelles seront ses marges de manœuvre et quelle place sera accordée à la culture dans la future Commission ? S’il affirme vouloir faire de l’IA un outil au service de la créativité humaine et protéger le Pacte pour les Compétences et les droits de propriété intellectuelle dans le contexte de l’IA, il devra aussi éclaircir  la manière dont il entend travailler avec Henna Virkkunen sur ces questions.

Le flou demeure encore sur ses intentions relatives à la directive SMA qu’il présente néanmoins comme  « le socle principal de la régulation européenne des médias pour favoriser la diversité culturelle ». Son évocation de l’obligation de « présence de contenus créatifs européens sur les plateformes de streaming » sans utiliser explicitement le terme de quotas reste ainsi à préciser. Le parallèle qu’il établit avec l’étude de la Commission européenne sur la découvrabilité pour soutenir la  mise en valeur des œuvres européennes mérite d’être complété, cette étude n’incluant pas le secteur audiovisuel à proprement parler. Ses propos lors de son audition n’ont malheureusement pas permis d’approfondir le sujet, car le futur Commissaire n’a que très brièvement évoqué les enjeux audiovisuels.

Enfin, Glenn Micallef envisage une coopération pour améliorer les conditions de travail des artistes, réduire les lacunes règlementaires et planifie une table ronde à haut niveau avec les acteurs culturels sur ce sujet.

Une chose semble sûre à ce stade : les questions que les députés européens ont adressées aux Commissaires démontrent à la fois l’importance des enjeux qui traversent le secteur culturel, la nécessité d’une ambition politique forte pour y répondre et un engagement sans faille de celles et ceux qui auront la charge de diriger l’administration bruxelloise ces prochaines années.

L’audition de Glenn Micallef s’est tenue le 4 novembre, celle de Henna Virkkunen suivra le 12 novembre, elles représentent toutes deux une opportunité cruciale pour réaffirmer ces objectifs et garantir que la culture demeure une priorité essentielle au sein de l’agenda européen.

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