Culture et services publics dans l’UE : et si la France et l’Allemagne s’emparaient du sujet ?
30 janvier 2014 par Guillaume Prieur - Vue(s) d'Europe
Si l’accord de la grande coalition allemande a permis de constater que la France et l’Allemagne partagent plus que jamais des positions communes sur la culture, un constat similaire s’est imposé à l’issue du colloque « (Re)légitimer l’action publique dans l’Union européenne : une perspective franco-allemande » organisé le 22 janvier à l’Assemblée nationale.
Le colloque fut, entre autres, l’occasion de débattre du traité de libre-échange transatlantique et de l’exception culturelle. Un consensus s’est clairement dégagé entre tous les intervenants, allemands comme français, secteur public comme privé, sur quatre points : 1) la culture est un bien qui n’est pas comme les autres, qui fait partie intégrante de l’identité européenne et devrait, au même titre que la défense, être toujours et automatiquement exclu des négociations commerciales ; 2) l’exclusion des services audiovisuels des négociations est d’autant plus primordiale que se joue actuellement une révolution technologique et qu’il est crucial de se laisser une marge de manœuvre afin de pouvoir adapter nos politiques de soutien à la culture, et de proposer des services en phase avec l’ère numérique; 3) le risque que les services audiovisuels soient finalement négociés n’est jamais définitivement écarté ; 4) le processus de négociation de l’accord est caractérisé par un réel manque de transparence.
Plus généralement, la conférence avait pour objectif principal de remettre les services publics d’intérêt général, incluant l’eau, les transports, l’électricité, la santé, l’enseignement, le logement et la culture, au centre des débats et de l’action de l’Union européenne. Pour cause, cette dernière a trop souvent oublié que les services publics ne sont pas des services marchands comme les autres, de par la place qu’ils occupent parmi les valeurs communes de l’UE, leur contribution à l’identité de l’Europe ou leur impact sur la cohésion sociale et territoriale d’un pays.
Une réflexion globale que l’on ne peut qu’accueillir favorablement et qui a commencé en mai 2013, avec une déclaration signée par diverses organisations allemandes investies au niveau culturel, communal et social, appelant à un dialogue urgent avec les responsables politiques et législatifs de l’Union Européenne, « pour le maintien et la promotion de systèmes d’intérêt général existants et bien rodés ». Un appel qui fut ensuite repris par l’Observatoire de l’action publique de la fondation Jean Jaurès et la Fondation européenne d’études progressistes.
Pour conclusion, cette proposition de la députée Françoise Castex, co-présidente de l’Observatoire de l’action publique: elle rappelle dans un essai co-écrit avec Pierre Bauby, que la Commission européenne, bien que marquée actuellement par l’idéologie libérale, est pourtant censée être l’organe de représentation de l’intérêt général communautaire. A ce titre, elle devrait recommencer à défendre le primat de l’intérêt général sur les règles de concurrence et réaffirmer le rôle essentiel des services publics. Cela pourrait passer par exemple, comme le recommande l’eurodéputée, par la nomination au sein de la Commission d’un vice-président ayant la charge de piloter une gouvernance transversale des services publics (transversale aux secteurs et transversale aux différentes politiques de l’UE). Une idée intéressante…espérons que pour une fois ces débats ne resteront pas confinés aux seuls colloques et essais politiques !
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