La résolution Svoboda, l’autre rapport du Parlement européen
15 juin 2015 par Guillaume Prieur - Vue(s) d'Europe
Plus discrètement que le projet de rapport de Julia Reda qui continue son parcours dans les commissions parlementaires, le Parlement européen vient d’adopter à une très large majorité une résolution préparée par l’eurodéputé polonais, Pavel Svoboda, et intitulée : « Vers un consensus renouvelé sur la protection des droits de propriété intellectuelle ».
Si elles n’ont pour l’heure pas bénéficié d’une large publicité, les préconisations du député Svoboda, avalisées par le Parlement européen, n’en sont pas moins essentielles. A la suite de la présentation par la Commission européenne de sa stratégie pour un marché unique numérique, cette résolution marque d’emblée la volonté résolue du Parlement de peser dans la mise en œuvre d’une Europe numérique. La priorité numérique ne se construira manifestement pas sans des députés qui veulent – à juste titre – avoir leurs mots dire. Elle ne s’élaborera pas non plus sans un engagement ferme à défendre les droits de propriété intellectuelle.
Le message est clair et ne souffre aucune ambigüité : la propriété intellectuelle joue « un rôle clé pour stimuler l’innovation, la créativité, la compétitivité, la croissance et la diversité culturelle » ; elle « représente souvent l’une des principales sources de revenus des professionnels de la culture… dès lors, la garantie d’une rémunération équitable pour les professionnels de la culture devrait constituer l’un des aspects principaux du plan d’action de l’Union. »
A rebours de ceux qui font du droit d’auteur un droit anachronique, le Parlement européen prend, avec cette résolution, le contre-pied en érigeant la protection des droits des créateurs en priorité politique et en l’ancrant dans une modernité indiscutable.
Au-delà, c’est aussi la stratégie mise en place par le gouvernement français pour contrer la contrefaçon commerciale qui se trouve soutenue et validée. Car le Parlement européen soutient ainsi l’adoption de mesures qui permettent de priver de leurs revenus les contrevenants agissant à une échelle commerciale en associant tous les acteurs de la chaîne de valeur. C’est bien cette même logique qui a prévalu lors de la signature en France récemment de la charte avec les acteurs de la publicité en ligne et prochainement sans doute avec les professionnels du paiement en ligne pour assécher le financement des sites de téléchargement ou de streaming illicites.
2015 semble donc placée sous le signe d’un consensus politique pour porter un coup d’arrêt aux sites qui pratiquent à des fins commerciales la mise à disposition illicite d’œuvres culturelles. Les Etats qui souhaitaient un engagement fort en faveur d’un haut-niveau de protection pour le droit d’auteur reçoivent le soutien de deux acteurs incontournables de la politique européenne : le Parlement Européen qui, avec cette résolution votée à une très large majorité, envoie un signal clair de sa volonté de soutenir les créateurs européens ; la Commission européenne qui avait déjà souligné dans sa stratégie pour un marché unique numérique sa volonté d’enclencher un plan d’action pour lutter contre les atteintes à la propriété intellectuelle.
Les signaux de la lutte contre la contrefaçon commerciale semblent être enfin passés au vert.
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